Avez-vous déjà rencontré le sosie du 18 novembre ? C'est un 22 décembre, sous les projecteurs de La Réserve... Ce 18 novembre réincarné dans la peau d'un 22 décembre était à couper le souffle. Aviez-vous eu la chance de déflorer ce phénomène de vos propres yeux ? D'abandonner votre ouïe à ce délice culturel ? Installez-vous donc, et régalez-vous des miettes que nos rédacteurs ont pu amasser pour vous dans cet article...
Le dimanche 22 décembre 2024, l'association JEUNESSE ENGAGÉE POUR LA RENAISSANCE D'HAÏTI (JERH), a offert à un considérable public avide de savoirs et de sensations fortes, 4 heures de voyage dans le temps, vers la révolution haïtienne de 1803, d'immersion dans les profondeurs du vodou, de dialogue en faveur et avec la culture haïtienne, sous le thème " Lespri Rezistans ", au local de La Réserve.
Le pseudo 18 novembre était marqué par deux activités majeures : La conférence autour de la révolution haïtienne incluant le thème et le spectacle qui illustrait le rassemblement des esclaves en 1803, le retour pour le questionnement sur l'usage de l'héritage en 2024 et le " Beny fèy " inévitable pour la période du Makaya, sans oublier le personnage principal, nommé Jan Zonbi.
La conférence a été alimentée par les trois interventions respectives de l'Historien Pierre Buteau, du Spiritualiste Welele Doubout et de la jeune Présidente du Gouvernement Jeunesse, Stéphanie Sophie Louis. Cette dernière qui jouait également le rôle de la modératrice, avec brio, doit-on dire.
L'intervention de Pierre Buteau regorgeait de faits marquants, de non-dits, de faces cachées de la révolution haïtienne. Il reconstituait d'une manière intrigante la bataille de vertières du 18 novembre 1803. Sans oublier de préciser le rôle actif qu'a joué Boukman dans cette lutte qui était déterminante pour la nation haïtienne.
Welele Doubout, quant à lui, a surtout axé son intervention sur la saison du Makaya, le personnage Makandal et certaines traditions haïtiennes. Il visait davantage à rappeler au public son origine profonde, tout comme le faisait le Dr. Jean-Price Mars dans La Vocation de l'élite. Il parlait de l'importance de la purification, la conception mauvaise, hypocrite que la plupart des haïtiens ont du vodou.
Stéphanie Sophie Louis, de son côté, a fait une intervention empreinte d'émotions, de paroles profondes, révoltantes. Une intervention qui émanait de son être, comme toujours. Elle a navigué autour des concepts " Viv Ansanm ", nègre, de la langue créole qui est devenue un outil de seconde zone, de la résistance, des retombées de l'indifférence des gens en 2015 sur 2024, des valeurs anciennes qui surpassaient le capital économique, de la centralisation à Port-au-Prince, marronnage, de la domination mentale, de l'animisme qui détient une place importante dans la culture haïtienne, du concept " moun "sur lequel elle compte réaliser une étude, entre autres. Et on retient même ces paroles remarquables dans son intervention : " Ou pale, wap mouri, ou pa pale, n ap mouri pi rèd ! E nou mouri pi lèd ! Se sa endepandans ye, viv lib oubyen mouri ! Paske pèsonn pa gen dwa pou l anpeche m ! E nan pye m, e nan tèt mwen ! Se sa lespri rezistans lan ye ! "
En somme, des interventions enrichissantes qui ne manqueront pas de germer dans l'esprit de ceux qui ont eu la chance de les suivre.
En ce qui concerne le spectacle, ce fût un moment d'immersion totale dans une spirale d'émotions qui défilaient au gré des battements puissants du tambour. Le diseur Ralph Alfred, dit Reeval, qui incarnait le personnage Jan Zonbi, était le principal pilote de ce voyage à travers le rassemblement des esclaves qui allait mener à la lutte pour l'indépendance, le retour du personnage en 2024 pour nous questionner sur l'usage que nous avons fait de cet héritage exceptionnel et enfin ce Beny du Makaya. Il émanait une énergie vibrante du corps des danseurs, leur fougue, leur connexion avec le tambour étaient impressionnantes. C'était un tel hommage à la culture, à la nature même qu'à un certain moment des papillons ont envahi la scène. C'était un spectacle des plus spectaculaires. L'invocation des loas comme Legba, Baron, entre autres, la mise en vedette des acteurs buvant du sang, constituaient un moment d'apprentissage et de conscientisation.
Ce 18 novembre réincarné dans la peau d'un 22 décembre était à couper le souffle. L'association JEUNESSE ENGAGÉE POUR LA RENAISSANCE D'HAÏTI (JERH), a su réunir les ressources humaines et matérielles nécessaires à la pleine réussite de ce moment sensationnel. Tout concordait avec le thème " Lespri Rezistans ". Tout comme les gens ont envie de se convertir après un sermon autour de l'Apocalypse, ainsi le public était à deux doigts de se convertir en Boukman, Makandal, Dessalines, après un tel voyage dans le Lakou de 1803.
Et vous avez raté cet événement ? Croyez-moi, vous êtes passé à côté de l'Haïti qui sommeille en vous...
Rédacteurs : Holdykens LAINÉ, Shelsy DICE, Beth-Sarah NICOLAS
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