L’économie du Bien-être : comment le bonheur influence la croissance économique ?

 

« Le véritable progrès économique ne se mesure pas uniquement à l'accumulation de richesses, mais à l'amélioration du bien-être et du bonheur des individus au sein de la société ». Par cette affirmation, Amartya Sen nous invite à nous interroger sur la finalité réelle du développement économique : s'agit-il exclusivement d'une question de croissance du PIB, ou doit-il plutôt viser l'amélioration de la qualité de vie des individus, en prenant en compte leur bien-être, leur épanouissement personnel et leur bonheur global ? Cette réflexion a donné naissance à une branche de l'économie appelée "Économie du bien-être". Elle analyse la qualité de vie, la satisfaction des besoins fondamentaux, le bonheur et d'autres aspects non monétaires qui contribuent au bien-être général, en utilisant divers indices de mesure tels que : L'Indice du Bonheur National Brut (BNB); l'Indice de Développement Humain (IDH); le Rapport Mondial sur le Bonheur (World Happiness Report). Puisque le bonheur est une notion subjective, dépendante des objectifs et attentes individuels, une question se pose : influence-t-il la croissance économique ou en est-il simplement le résultat ?


Les liens entre bonheur et croissance économique


De nombreuses études ont mis en évidence une corrélation positive entre bonheur et croissance économique. La croissance améliore le niveau de vie, facilite l'accès aux biens et services et crée des opportunités professionnelles, contribuant ainsi au bien-être. Cependant, au-delà d'un certain seuil de revenu, cette relation tend à s'atténuer (paradoxe d'Easterlin). D'autres facteurs tels que le soutien social, la liberté de choix, l'accès aux soins de santé et la qualité de l'environnement influencent également le bonheur des individus.


Les facteurs de bonheur affectant la croissance économique

L'Indice du Bonheur National Brut, adopté par le Bhoutan dans les années 1970, repose sur neuf dimensions essentielles à la prospérité économique :


1. Bien-être psychologique : Une population en bonne santé mentale est plus productive et 

engagée.

2. Santé : Un système de santé efficace favorise une main-d'œuvre performante et réduit les 

coûts des maladies.

3. Éducation : L'investissement dans l'éducation accroît les compétences et la productivité des travailleurs.


4. Utilisation du temps : Une gestion efficace du temps améliore la productivité et optimise les performances.


5. Diversité culturelle et résilience : L'ouverture à la culture et à l'innovation stimule la compétitivité.


6. Bonne gouvernance : Des institutions transparentes attirent la confiance des investisseurs.


7. Vitalité communautaire : Une forte cohésion sociale favorise un environnement de travail stable.


8. Diversité écologique : La préservation de l'environnement assure la durabilité des ressources.


9. Niveau de vie : Une augmentation du niveau de vie encourage la consommation et stimule la demande.

Impacts concrets sur l'économie

Un exemple notable est celui du Bhoutan, qui a adopté le BNB pour guider ses politiques publiques. Ce pays a adopté le concept de Bonheur National Brut (BNB) dans les années 1970, considérant que la croissance économique seule ne suffisait pas à assurer le bien-être de la population. Son approche repose sur plusieurs dimensions intégrées aux politiques publiques, dont :

La conservation de l'environnement : Avec plus de 70 % de son territoire couvert de forêts, il est un des rares pays à être carbone-négatif.


 L'éducation : L'accès universel et gratuit à l'éducation favorise le développement des compétences.


La santé : Un système de santé gratuit réduit les inégalités et améliore la productivité.


 L'équilibre entre modernisation et traditions : Le pays préserve ses valeurs tout en s'ouvrant au marché mondial.


 La gouvernance participative : Une gestion transparente assure la stabilité économique et sociale.


Cette approche a permis au Bhoutan d'assurer une croissance économique durable tout en maintenant un haut niveau de satisfaction parmi sa population. Elle constitue une alternative intéressante aux modèles basés uniquement sur l'accumulation de richesses.

Les gouvernements et les entreprises ont tout intérêt à intégrer le bien-être dans leurs stratégies économiques. Les pouvoirs publics pourraient suivre l'exemple du Bhoutan en :


- Adoptant des indicateurs de bien-être en complément du PIB

 -Réduisant les inégalités sociales

 -Investissant davantage dans l'éducation, la santé et l'environnement

-Encourageant un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle


Quant aux entreprises, elles peuvent améliorer la satisfaction de leurs employés grâce à des pratiques de travail plus flexibles et un cadre plus stimulant. Un environnement de travail sain accroît la productivité et réduit le”turn over”. Et pour optimiser tout cela… il suffit de faire appel à un ingénieur industriel !


Bien que le BNB présente certaines limites, notamment sa difficulté d'application dans des économies complexes, il demeure un modèle inspirant d'un développement équilibré. La relation entre bonheur et croissance économique est donc réciproque : le bonheur favorise la prospérité économique, tout comme la croissance économique contribue à améliorer le bien-être des individus.



Auteure : Rémica RÉMY

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